Nous avons vu précédemment comment les usages d’Internet sont inégaux entre les individus (Article 2 Décembre), mais aussi comment l’utilisation d’outils numériques peuvent potentiellement réduire les inégalités scolaires (Article 6 Décembre). Aujourd’hui, nous prenons de la hauteur pour comprendre le chemin parcouru dans la manière de penser les disparités d’utilisation du numérique. En effet, si les acteurs ont d’abord pensé la diffusion des TIC comme la réduction d’une « fracture numérique », la lecture qui est faite aujourd’hui est plutôt centrée sur les inégalités numériques. 

Commençons par revenir sur l’apparition du problème de la diffusion du numérique au sein de la société à travers l’émergence du concept de « fracture numérique ».

La diffusion des supports informatiques et multimédias dans la société est très vite devenue un enjeu de développement économique et territorial. Les mutations engagées par les TIC dans l’économie capitaliste ont conduit les pouvoirs publics à s’engager dans la transformation des systèmes productifs pour suivre ces évolutions. Au niveau national et européen, l’accroissement des infrastructures et des NTIC a accompagné la dématérialisation des échanges dans l’économie. C’est par conséquent dans le domaine de l’aménagement du territoire qu’est apparue cette question politique. Si les supports consommés ont connu une augmentation progressive et constante au sein de la population, leur répartition sur le territoire s’est faite inégalement. Des disparités qui ont conduit les pouvoirs publics à inscrire de nouveaux enjeux dans la politique publique et à poser sur ces inégalités des concepts.

Le terme de fracture numérique, fut traduit de l’anglais « digital divide » et est apparu en 1995. Il se rapporte au constat d’asymétrie dans la diffusion des NTIC au sein de la population.
La fracture numérique peut être constatée dans plusieurs dimensions qui ont fait l’objet d’une construction en tant que problème public et politique. La fracture territoriale symbolise l’inégalité entre les territoires en termes d’infrastructures et de diffusion géographique. La fracture générationnelle distingue selon l’âge l’utilisation des supports numériques et des services disponibles. La fracture sociale apparaît comme un facteur majeur du non-usage des outils numérique par une partie de la population. Premièrement car les équipements ont un coût (matériel, abonnement internet et ligne téléphonique) mais aussi car le niveau d’éducation, de formation, d’accès à la culture peuvent être des freins à cet usage. Les inégalités s’expriment aussi dans les usages associés aux outils numériques : utiliser un ordinateur ne signifie pas posséder les savoirs pour effectuer des démarches en ligne, une réservation ou trouver une information fiable.

La prise en charge de la dimension sociale de l’utilisation ou non des équipements et des TIC a donc posé la question des inégalités et modifié sa prise en charge. Comprendre les inégalités numériques implique ainsi de comprendre les différences dans les capacités d’appropriation du numérique… ce que nous aborderons demain 🙂