ACCÈS À L’IA : UN DÉFI POUR LES ORGANISMES DE FORMATION

17 Juin

ll existe aujourd’hui une grande variété de moyens d’accéder à l’intelligence artificielle, et en particulier aux LLM (Large Language Models), selon les besoins, les usages, les compétences techniques et les contraintes de confidentialité. Les services commerciaux comme ChatGPTClaude Gemini, Perplexity offrent un accès instantané via des interfaces web ou des API, en s’appuyant sur des modèles hébergés dans le cloud. Pour plus de contrôle et de confidentialité, il est possible d’installer localement des modèles open source comme Mistral, LLaMA ou Phi-2, à l’aide d’outils comme OllamaLM Studio, GPT4All, Msty. Des applications open source comme LangChainFlowise ou LlamaIndex permettent de concevoir des agents conversationnels personnalisés, capables de traiter des documents locaux ou des bases vectorielles. L’IA irrigue également les systèmes d’exploitation : Apple Intelligence dans iOS/macOS ou Windows Copilot dans Windows. Une plate-forme comme Hugging Face propose, de son côté, un écosystème complet de modèles et de bibliothèques open source, accessibles via API ou exécutable localement, couvrant aussi bien le texte que l’image ou l’audio. Des outils spécialisés comme Gamma.app ou Tome.app exploitent les LLM pour générer automatiquement des présentations ou du contenu visuel, tandis que d’autres modèles génératifs — non considérés comme des LLM — prennent en charge la transcription audio, la synthèse vocale, le clonage de voix ou la génération d’images (comme Stable Diffusion ou Bark), souvent en interaction avec des LLM pour enrichir les scénarios ou structurer les prompts. Enfin, les navigateurs (je viens juste de tester le nouveau navigateur Dia), les applications de création (dont la suite Adobe), sans compter les clients mail, apportent l’IA dans au cœur de leurs fonctionnalités, là pour analyser/résumer le contenu d’un onglet, ici pour agrandir une image ou lisser la peau d’un visage.

Ces multiples points d’accès permettent de combiner flexibilité, créativité, performance et respect de la vie privée selon les cas d’usage.

Tant que le choix des outils reste à l’initiative des formateurs, cette diversité doit être vue positivement. Elle permet à chacun d’adapter l’IA à ses publics, sa discipline, ses approches didactiques et pédagogiques. Elle peut aussi créer une sorte d’émulation, favoriser le partage de pratiques, nourrir une intelligence collective. La situation d’un organisme de formation où chaque formateur explore, teste et adopte des outils variés — qu’ils soient commerciaux, open source, locaux ou intégrés dans les environnements existants — n’est-elle pas beaucoup plus enviable que celle d’un organisme où tous les formateurs se limiteraient à un seul outil, par exemple ChatGPT ? La réponse est dans la question. Même si cela peut engendrer des situations d’inégalité, et donc des tensions, entre des formateurs qui peuvent prendre un abonnement payant à ChatGPT, ou à Gamma et des formateurs qui doivent se contenter d’outils gratuits aux fonctionnalités plus limitées, entre des formateurs qui ont le background technique suffisant pour utiliser telles quelles des solutions open source et des formateurs qui doivent recourir à des solutions no code qui simplifient l’installation et le paramétrage, mais avec, en contrepartie, des abonnements à un coût non négligeable.

La diversité des modèles, des outils IA, des espaces où ils peuvent se déployer, être instanciés pose en revanche un vrai défi aux organismes de formation. Il s’agit moins ici d’un défi éthique ou d’un défi lié à la protection des données personnelles ou à la transformation implicite du métier de formateur (de plus en plus amené à déléguer des tâches cognitives aux machines) que d’un défi technico-économique. En effet, les organismes de formation ne peuvent se contenter de satisfaire passivement la diversité croissante des besoins, des préférences et des usages individuels des formateurs en matière d’IA. Imaginons les conséquences financières si 50 formateurs d’un même établissement, mais utilisant 25 outils payants différents, demandaient à la direction de prendre en charge le coût des abonnements. Imaginons les conséquences organisationnelles si 5 formateurs geeks de l’équipe sollicitaient le service informatique pour installer localement leur LLM préféré.

Or, les organismes de formation sont d’un côté confrontés à des formules d’abonnement opaques, aux coûts variables, de l’autre à des niveaux d’exigences techniques très hétérogènes.
Cela conduit à des alternatives délicates (liste non exhaustive).

  • Faut-il recourir à des outils gratuits (fremium), ou à des solutions payantes ? Les premiers peuvent disparaître, changer leur politique, ou voir leurs fonctionnalités initiales dégradées. La pérennité des secondes est en principe mieux garantie, mais, dans un environnement très mouvant et très évolutif, il faut rester prudent : rachat, fusion avec comme conséquences l’évolution du modèle tarifaire, ou, plus grave, la disparition des sources à partir desquelles des contenus pédagogiques auront pu être créés.
  • Convient-il mieux d’investir dans l’auto-hébergement d’un LLM open source, ou de s’appuyer sur une solution commerciale telle que ChatGPT ou Mistral ? Le premier choix est à la portée d’un organisme de formation disposant d’un service informatique aux compétences techniques élevées, d’une infrastructure matérielle puissante, pour des résultats incertains, à condition de faire appel à un prestataire spécialisé, mais à quel coût ?
  • Utiliser Gemini dans Google Workspace se fait sans coûts supplémentaires et facilite en outre l’adoption de l’IA par les formateurs qui pourraient manifester une certaine résistance : l’IA s’intègre dans leurs outils de travail quotidiens. Mais, hélas, ce « coût constant » ne concerne pas toutes les suites logicielles. Dans le cas de Microsoft 365, l’accès à Copilot nécessite une licence spécifique, souvent onéreuse. Quant à Adobe, disposer d’une licence Creative Cloud éducation ne donne pas le droit d’utiliser sans limites l’IA pour interroger, résumer les fichiers PDF ouverts dans Acrobat Pro.

Ces alternatives, parfois délicates, montrent que les organismes de formation ne peuvent éviter à moyen et long terme une réflexion stratégique sur les outils IA. L’intégration technique et économique de l’IA ne peut plus être pensée à la seule échelle individuelle, même si, bien sûr, les formateurs ont toute leur place pour identifier des outils soutenables économiquement, compatibles avec le cadre pédagogique et les contraintes du service informatique.

Cette contribution a été élaborée avec l’appui de ChatGPT. L’IA a été sollicitée dans une démarche heuristique et dialogique, pour clarifier certaines idées, proposer des reformulations stylistiques, explorer des alternatives argumentatives, suggérer des exemples, générer l’illustration. L’ensemble des contenus a fait l’objet d’une vérification humaine systématique, tant sur le fond que sur la forme. La thèse avancée, la progression argumentative, la conclusion relèvent pleinement de l’auteur. L’IA a ici servi à enrichir la démarche intellectuelle, non à s’y substituer.