Quand le climat re-questionne la formation

20 Déc

Calendrier du 20 décembre 2021
par un contributeur engagé

Après 25 ans à tenter de convaincre les DRH, les organismes de formation, les financeurs publics et privés, les acheteurs, que l’avenir de la formation était dans le digital learning, et au moment où chacun ouvre ses chakras pour l’accueillir avec plaisir, v’là-ti-pas que la question du climat nous tombe dessus. Et quand je dis la question, je veux parler de toutes les réflexions qui habitent notre quotidien, que ce soit dans nos modes de consommation alimentaire, vestimentaire, culturelle, notre manière de nous déplacer et bien sûr… ce qui nous pousse à consommer toujours plus de numérique. Car il s’agit bien aujourd’hui de réfléchir sur nos modes de vie et de réduire les émissions de gaz à effets de serre par tous les moyens. Cela a été débattu à Glasgow il y a quelques semaines, repris par tous les médias, et ce que l’on aurait pu prendre il y a une génération pour un trouble-fête, est devenu un incontournable pour continuer à exister dignement.

Et le numérique en prend pour son grade ! Il représente 4% des émissions des gaz à effet de serre d’origine humaine (plus que l’aviation civile), il est destructeur des sols, énorme consommateur de métaux rares et d’énergies fossiles… Alors quoi ? Il faut abandonner le digital learning et revenir aux formations présentielles ?

Maintenant que la « fichue » pandémie a amené (le vrai terme serait plutôt “obligé”) les équipes de formation à passer à la distance, qu’elles s’y habituent, qu’elles y prennent goût à force de réinventer leur quotidien pédagogique, que la multimodalité devient même confortable, que les commanditaires de formation réalisent à quel point le numérique peut être porteur de renouveau dans la pédagogie, d’attraction pour les apprenants et que le marché du digital learning est enfin mûr pour se développer, l’écosystème formation se met au garde à vous devant le climat. Ambivalence ! 

Terminés les apprentissages par simulation en réalité virtuelle ? Finies les procédures que l’on peut répéter à l’infini grâce à une tablette et une solution de réalité augmentée ? Exit les travaux collaboratifs en ligne, les vidéos pédagogiques, les MOOC ? Non, non et non, pas question ! Et d’ailleurs, ce ne serait pas raisonnable. Ah tiens ! ce mot « raisonnable » arrive à point nommé.

Si l’écosystème automobile a mis 100 ans à construire des véhicules plus propres, plus sobres, à inciter au covoiturage, c’est dès maintenant que nous devons, acteurs de la formation, entrer le développement durable dans la construction et la diffusion des offres pédagogiques. Le numérique nous a séduit, nous en avons fait un levier d’innovation, un “meilleur pédagogique », heureux de pouvoir tout tester, persuadés d’optimiser l’individualisation des parcours. C’est certainement vrai, mais jusqu’à quel point ?

Dans quelles circonstances est-il vraiment utile de faire appel à des profs holographiques ? Est-il raisonnable de développer plusieurs fois une même ressource pédagogique sous forme numérique, uniquement pour avoir celle qui “nous ressemble le plus” ? Faut-il obligatoirement détenir un ordinateur et un smartphone pour se former ? 

Combien le surplus coûte-t-il en gaz à effets de serre ?

Loin d’avoir les réponses, nous sommes persuadés qu’au bien connu triangle de Jean Houssaye “Savoir/Apprenant /Formateur”, il est urgent d’adjoindre un nouvel axe de réflexion autour de  “Sobriété numérique / Efficience pédagogique / Attractivité de la formation”.

Le numérique traverse nos activités, le climat nous demande de le penser “durable”. Par ailleurs l’apprenant devient un véritable consommateur puisqu’il peut choisir directement sa formation via le CPF. 

Après l’EAO, la FOAD, le digital learning, la formation multimodale, imaginons dès maintenant la formation numérique durable en questionnant et responsabilisant l’ensemble des acteurs de l’écosystème : Edtech, organismes, acheteurs, financeurs et apprenants.

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