Dans quel sens doit-on aborder le projet de transformation digitale de l’organisme de formation ?
Projet Top-down imaginé et construit par la direction pour être ensuite appliqué par les équipes ? Ou projet Bottom-up bâti sur des expérimentations de terrain ?
Les dizaines de projets accompagnés ces 20 dernières années m’ont permis d’arriver à la conclusion que la vérité se situe certainement entre ces deux extrêmes. Le projet de transformation digitale de l’organisme de formation donc être une rencontre entre une stratégie digitale et des pratiques numériques individuelles.
La stratégie digitale s’inscrit dans le projet d’entreprise. Elle y trouve sa légitimité en étant au service de celui-ci, en agissant dans le contexte de réforme actuel comme un levier du changement. Le projet d’entreprise est le reflet d’une vision, il a été conçu en intégrant un ensemble de paramètres et fixe des objectifs à moyen et long terme. La stratégie digitale qui l’accompagne peut ainsi prendre du sens et servir de repère, de fil conducteur tout au long du projet. Mais la transformation ne s’opérera que si le projet numérique peut s’appuyer sur une base solide.
Ce sont les expériences individuelles et les compétences des formateurs qui forment ce socle. Dans de nombreuses structures, les formateurs se sont emparés de la question numérique de leur propre initiative, et ceci bien avant le rapport de l’IGAS en 2017 qui pointait un retard en la matière pour plus de 50 % des organismes de formation. Les raisons de cet engagement individuel sont assez diverses : passion pour les technologies numériques, goût pour la nouveauté, recherche de méthodes et de moyens pédagogiques plus efficaces ou plus en phase avec leurs publics, ou simple effet de mode.. A travers ces pratiques occasionnelles ou régulières, ils acquièrent, outre de nouvelles compétences, une certaine assurance. Cette assurance qui manque à nombre de leurs collègues que la technologie déstabilise, provoquant quelquefois un phénomène de rejet. Ces pratiques enthousiastes mais désordonnées ont toutefois des inconvénients : manque de cohérence pour les apprenants qui subissent une multiplicité d’outils, pas ou peu de mutualisation ou de partage d’expériences, essoufflement face au travail en solo et le plus souvent sur du temps personnel.
En mettant à profit ces compétences nées des expériences individuelles, en les favorisant même, le projet de transformation digitale disposera non seulement d’un point d’appui solide mais aussi d’ambassadeurs auprès de tous les acteurs encore réticents. Les formateurs quant à eux trouveront dans la stratégie de digitalisation de l’établissement des repères, des moyens, un soutient et une forme de reconnaissance de leur investissement. Ils peuvent ainsi constituer une communauté d’acteurs et d’intérêt indispensable à un déploiement à grande échelle et à un ancrage durable.
Stratégie digitale et expérimentation individuelle libre : un duo gagnant.
Jean-Luc Peuvrier – Stratice
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