la vidéo mobile : un fantasme ?

18 Déc

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La vidéo sera demain le média privilégié sur le Web et les réseaux sociaux, les projections l’affirment. Du coup, tout le monde veut apprendre à produire des contenus vidéo, de préférence avec des smartphones puisqu’avec eux chacun a dans sa poche une caméra HD, voire Ultra HD. Avec une courte formation, chacun remplace ainsi ses mauvaises habitudes par une culture professionnelle minimum de l’image et le socle technique de base. Pour être en mesure, avec deux ou trois accessoires (un pied, un support -ou grip- et un micro pour commencer) de produire les images permettant de réaliser à peu près n’importe quel petit film de 1 ou 2 minutes, et ce quel que soit le modèle de smartphone utilisé.

Malheureusement, là s’arrête le fantasme de la vidéo « mobile » pour tous et pour tout.

Sur le fond, il est illusoire de croire que tout est matière à vidéo. « Comment rendre dynamique en vidéo une annonce stratégique ou la présentation d’un bilan financier » me demande-t’on souvent ? Si l’objectif est que la vidéo soit regardée -et non de flatter l’ego des personnes filmées- il est essentiel que les propos soient illustrés avec des plans courts et variés. A l’ère des blockbusters où les scènes d’action enchaînent parfois trois plans en l’espace de deux secondes, s’il n’y a rien d’autre à montrer que la personne qui parle devant la caméra pendant plus de 20 secondes, alors la vidéo n’est pas le bon média.

Si vous avez assez de plans d’illustration pertinents, sachez ensuite que tout le monde n’est pas à la même enseigne côté montage. Le montage « pro » est réservé aux détenteurs d’iPhones et, dans une moindre mesure, aux possesseurs de certains smartphones Android haut de gamme. Il faut en effet des appareils musclés pour « recouvrir » au montage les propos d’une personne interviewée par des images d’illustration. Autrement dit pour traiter deux couches de vidéo l’une sur l’autre, avec des applications payantes souvent par abonnement. Sur les autres smartphones et avec des applis gratuites, on doit se contenter d’une seule piste vidéo pour des montages qui n’ont, de fait, plus rien de « pro ».

Pour monter avec les doigts plusieurs pistes (vidéo, audio, titres incrustés, etc.), mieux vaut aussi un smartphone grand écran… voire une tablette où on aura préalablement transféré les rushes. La possibilité de commencer le montage sur le smartphone et de le continuer sur un ordinateur ne concerne aujourd’hui que les possesseurs d’iPhones, soit équipés de Mac, soit ayant souscrit un abonnement au Creative Cloud d’Adobe et utilisant la nouvelle solution de montage Adobe Premiere Rush. Peu d’élus, donc !

Au delà de ces barrières matérielles, le montage est une activité indéniablement ludique que chacun peut acquérir… mais qui reste terriblement chronophage : il n’est pas rare de relever la tête pour constater qu’on a passé trois heures sur un montage de deux minutes. Si le smartphone met bien la vidéo à la portée de tous, les appareils ne sont pas égaux. Et rares sont ceux qui peuvent lui consacrer le temps qu’elle exige en plus de leurs autres activités professionnelles.

Laurent Clause – Journaliste reporter d’image et formateur


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